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Le sport pour lutter contre la dépression

Publié le 10 janvier 2023

Le sport pour lutter contre la dépression

Il y a quelques semaines, Anna, bénéficiaire du DAHLIR depuis plusieurs années, nous a raconté son parcours, son combat contre la dépression et comment le sport l'aide au quotidien à lutter contre la maladie.

Pouvez-vous me raconter votre parcours ? 

Je suis tombé malade en 2020, à la suite d’une erreur au travail, et après une année assez difficile. 

Je suis préparatrice en pharmacie hospitalière. Pendant l’épidémie de COVID, c’était très compliqué. On recevait le plus de patients possibles. On transformait les salles de réanimation en salle de réception de patients COVID pour pouvoir accueillir tout le monde. Je passais énormément de temps au travail, avec à côté mes 3 enfants qui étaient scolarisés à la maison, à gérer. Mon mari était en plus bloqué à l’étranger après un voyage d’affaires.  

Dans le même temps, mon père était malade et hospitalisé. Après le confinement, il n’a plus été possible de le voir. J’ai eu un sentiment de culpabilité affreux pour mon père, il avait du mal à comprendre la situation. 

J’étais donc dans un état de faiblesse, qui a persisté jusqu’à l’été. J’ai alors malheureusement fait une erreur au travail, qui n’a pas été corrigé dans le rush à l’hôpital. Je l’ai appris pendant mes vacances par mail, et j’ai passé mes semaines de vacances à ruminer. 

Je suis retournée travailler quand même, mais je n’allais pas bien, je n’arrivais plus à dormir. J’avais perdu une dizaine de kilos. J’ai travaillé jusqu’à fin septembre. Je suis allée consulter, et on m’a parlé de dépression. Au début, je n’ai pas voulu en entendre parler. Et j’ai commencé finalement à être traitée mi-octobre. 

Malgré cela, j’ai atterri à l’hôpital début novembre. J’ai essayé de tenir le plus longtemps possible sans être hospitalisée car c’était l’anniversaire de mes deux filles fin octobre. Je voulais tenir jusque-là.  

Et depuis je me bats avec une dépression récurrente, cela fait 2 ans. 

 

Quand et comment avez-vous repris le sport ? 

J’ai redécouvert le sport ici, à l’hôpital Le Vinatier. J’avais complétement banni le sport de ma vie. Je n’avais pas le temps, et je n’y prêtais pas du tout attention. La dernière fois que j’avais dû faire du sport, c’était à la fac.  

A l’hôpital, nous avons des intervenants qui viennent très régulièrement nous proposer différentes séances. J’ai décidé d’essayer et cela m’a bien aidé. Je m’y suis mise régulièrement. 

 

Et ensuite ? 

Les périodes où j’allais mieux et où je n’étais plus hospitalisé, je venais quand même à l’hôpital pour les séances de sport. Puis à un moment, Nathalie, l’intervenante du centre sportif du Vinatier, m’a dit qu’il fallait me trouver autre chose, et m’a parlé du DAHLIR. Nathalie a pris le rendez-vous avec l’association, puis s’est déplacée avec moi.

J’ai réalisé un entretien avec Jean-Renaud (chargé d’accompagnement au DAHLIR), et on a fait des tests de conditions physiques pour voir ce qu’il était possible de faire. Cela s’est super bien passé, et j’ai ensuite pu être accompagnée par l’association. 

 

Vers quelles activités le DAHLIR vous a accompagné ? 

Deux choses m’ont été proposées, selon mes envies. 

D’abord, j’ai parlé de mon rêve d’apprendre à faire du vélo. Je n’en avais jamais fait. Petite, mon père m’interdisait d’en faire en disant que ce n’était pas pour les filles. 

Le DAHLIR a alors trouvé une école, la Maison du Vélo de Lyon, pour que je puisse apprendre. Le vélo école a été une formidable opportunité pour moi.
J’ai pu faire deux cours, je suis malheureusement tombée malade pour le troisième. Mais j’ai réussi à en faire. C’était un super moment, et j’espère pouvoir continuer à suivre les cours quand j’irai mieux. 

En plus du vélo, je voulais faire du renforcement musculaire. J’ai pu être accompagné pour tester l’activité dans différentes salles et structures. J’ai notamment fait plusieurs séances à la Croix-Rousse. Mais selon les intervenants, j’étais plus ou moins contente de l’activité et les cours étaient l’après-midi. Cela ne me correspondait pas. J’ai en effet un problème d’insuffisance surrénalienne et il peut m’arriver d’être très fatiguée les après-midis. Je voulais aussi quelque chose de plus intense.  Jean-Renaud m’a alors accompagné à Décines, à côté de chez moi, sur des cours de gymnastique dynamique. Cela m’a vraiment plu. Je voulais m’inscrire à la rentrée, mais je n’allais pas bien et je n’ai donc pas fait les démarches. 

J’essaye aussi de faire régulièrement du yoga, avec une voisine qui donne des cours. 

 

Comment l’accompagnement de Jean-Renaud vous a aidé et vous aide encore ? 

La plus grande difficulté pour moi par rapport au sport, c’est de trouver le temps de chercher une activité et de pratiquer. Je vais consacrer mon temps à autre chose, à des démarches administratives personnelles, mes enfants, ma famille… Alors, Jean Renaud m’a beaucoup aidé dans les démarches pour trouver quelque chose qui me convienne. 

Quand il y a quelqu’un qui intervient et qui prend du temps pour m’aider, je me sens beaucoup plus poussée et motivée à faire les choses. C’est ça qui m’a poussé… C’est super important de se sentir soutenue.  On a établi une vraie relation de confiance avec Jean-Renaud. Et de savoir qu’il y a quelqu’un que l’on connaît, sur qui on peut compter, c’est important, notamment quand on ne va pas bien. Avec quelqu’un que l’on ne connait pas, c’est plus difficile. 

Jean-Renaud prend en plus régulièrement des nouvelles, notamment quand je suis hospitalisé pour voir où j’en suis, comment je vais. 

 

Quels bénéfices le sport vous a apporté ? 

J’ai vraiment senti les bienfaits du sport. Cela m’a d’abord permis de connecter ma tête à mon corps. Parce que j’avais l’impression d’avoir une coupure entre les deux. Je n’existais plus que par la tête, les pensées, le corps était là comme un robot ou un zombie. 

Même si on n’a pas envie d’y aller au début, cela fait du bien d’en faire. Notamment pour moi car le sport permet d’éliminer beaucoup plus rapidement les médicaments du corps ce qui diminue les effets secondaires. Je ne le savais pas, et je l’ai appris en pratiquant. Sur le long terme, cela peut même permettre de réduire la dose de médicaments à prendre. 

Je pense que à terme, je pourrais devenir plus endurante physiquement avec les séances, je pense que ça m’aiderait à être plus endurante psychologiquement aussi. 

 

Et le vélo ? 

Le vélo m’a aidé à me fixer un but, et c’est très important d’en avoir un quand on ne va pas bien. On se projette, il y a quelque chose qui nous attend et nous fait plaisir. C’est un bon levier de motivation. 

Et puis c’était un rêve pour moi de savoir en faire. Alors de sentir cette sensation de liberté, le vent dans les cheveux… c’était merveilleux. 

 

Quelles sont vos prochains objectifs ? 

Quand je ne serai plus hospitalisée, j’aimerais pouvoir aller à la piscine et éventuellement faire des cours d’aquagym. Cela me permettra de me renforcer et de travailler mon cardio. 

Je souhaite aussi continuer les cours de vélo. Mon objectif serait de pouvoir faire des balades avec mes filles. Et si je suis vraiment à l’aise, je pourrais effectuer mes déplacements seule, en vélo, sans voiture. Pour l’instant, c’est trop tôt pour me déplacer à vélo dans Lyon. Mais dans les prochains cours avec l’école, on va apprendre à mieux tourner, à avoir un meilleur équilibre, à rouler en sécurité… 


Propos recueillis par Pierre Boccon