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Actions dans les QPV de Bourg-en-Bresse #10ans🎂

Publié le 18 octobre 2022

Actions dans les QPV de Bourg-en-Bresse #10ans🎂

Cette année, le DAHLIR a 10 ans ! Et pour célébrer cette première décennie, nous nous replongeons dans son histoire. Pour le quatrième article de cette rubrique, Julia Louyot, chargée d'accompagnement QPV au DAHLIR, nous parle du dispositif et des actions qu'elles mènent à Bourg-en-Bresse (01).

En quoi consiste ton métier de chargée d’accompagnement DAHLIR dans les Quartiers Prioritaires de la ville à Bourg-en-Bresse ? 

La partie principale de mon travail est l’accompagnement des habitants vivant au sein des Quartiers Prioritaires vers une reprise d’activité de loisirs.
Pour arriver Ă  cela, il faut rĂ©ussir Ă  toucher ces habitants et se faire connaĂ®tre. Cela nĂ©cessite un gros travail partenarial avec tous les acteurs de terrain du territoire, que cela soit dans le social, le mĂ©dico-social, le socio-professionnel, l’insertion professionnelle… 

Il y a en plus un travail de médiation auprès des habitants. On doit aller vers eux, pour en finalité réaliser un accompagnement individuel vers une reprise d’activités de loisirs. 

On peut aussi ponctuellement construire des projets suite Ă  des financements (contrats de ville, quartiers d’étĂ©…) pour mettre en place des activitĂ©s dans les quartiers ce qui permet de nous faire connaĂ®tre et de toucher diffĂ©rentes personnes. 

 

Qu’est-ce qui a poussé le développement de telles actions sur les QPV de Bourg-en-Bresse ? 

Suite à un diagnostic de la Direction Départementale de la Cohésion Sociale (devenu la Direction Départementale de l’Emploi, du Travail et des Solidarités aujourd’hui), il est ressorti que dans les quartiers prioritaires, la pratique, notamment sportive, est faible. La part des habitants en QPV licenciés en club est très faible comparativement aux autres habitants de la ville. Les habitants n’ont soit pas connaissance soit n’osent pas s’inscrire. Selon leurs problématiques, ils ont besoin d’être accompagnés pour avoir une pratique plus importante. Le DAHLIR a été appelé pour essayer de renforcer cette pratique, d’amener les gens vers une pratique régulière en club. 

Sur Bourg-en-Bresse, cela concernait surtout au départ les seniors et les femmes. Ils étaient plus laissés de côté vis-à-vis de la pratique. Mais aujourd’hui, il ressort aussi d’autres besoins, notamment sur les jeunes, que l’on constate aussi en terrain. 

 

A quoi est due cette différence sur les QPV ? 

Il y a un problème qui peut être culturel. Certains publics, notamment certaines femmes, n’ont pas l’habitude d’avoir une activité de loisir. Parfois, on ne leur a jamais demandé ce qu’elles aimaient faire ou ce qu’elles avaient envie de faire. Culturellement parlant, faire du sport, ce n’est pas une priorité ou cela n’existe pas. Elles se rendent compte aujourd’hui que c’est accessible à tous et qu’elles peuvent pratiquer. Pour les jeunes filles aussi par exemple, il faut parfois convaincre les parents qu’elles peuvent faire du sport. Pour certaines, elles ne peuvent pratiquer seulement avec des filles. 

Il peut aussi avoir un problème de langue. Je me rends compte que j’accompagne beaucoup de personnes, qui sont en France depuis longtemps, qui ne savent pas lire ou écrire, et pour qui cela va être compliqué de faire des recherches, même si elles ont envie de faire du sport. Elles ne savent pas vers qui aller ou où se tourner. 

Il peut aussi avoir des problèmes financiers ou de motivation sur le long terme. Globalement, on ressent que le sport n’est pas une priorité. Pour les enfants, les parents vont mettre l’accent sur l’école. Il faut alors leur faire comprendre qu’ils ne peuvent pas étudier toute la journée, sans loisir. Pour les adultes, d’autres soucis seront aussi pris en compte en priorité. Alors que, justement, la pratique du sport leur permet d’être pendant une heure loin de ces soucis, et ils seront plus disponibles ensuite pour les régler. Ils ne peuvent pas être en boucle sur leur recherche d’emploi ou autre. Cela peut être bénéfique d’avoir un loisir. Cela oblige à sortir, à prendre du temps pour soi, à s’aérer l’esprit. 

Comment le dispositif s’est mis en place à Bourg-en-Bresse ? 

Après le diagnostic réalisé par la DDCS, le DAHLIR a été sollicité. Son implantation a alors débuté par des nombreuses rencontres partenariales, afin de se faire connaître par les acteurs du territoire. 

Depuis, je collabore beaucoup avec une mĂ©diatrice qui travaille pour la sauvegarde de l’enfance au niveau de l’accès aux droits pour les familles. On s’est tout de suite très bien entendues et elle me donne beaucoup d’orientations.  

Je travaille aussi avec le Dispositif de Réussite Éducative et je suis assez sollicitée par les acteurs de l’insertion professionnelle, notamment par les Conseillers d’Insertion Professionnelle. Cela permet parfois aux bénéficiaires de passer par le sport avant d’arriver à l’emploi, mais aussi de remettre en mouvement certains personnes très éloignés de la pratique avant d’envisager une reprise d’emploi. 

Et je travaille beaucoup avec les centres sociaux et avec Campus Tremplin pour les réfugiés. 

 

Comment le dispositif fonctionne concrètement ? 

Sur Bourg-en-Bresse, il y a deux leviers principaux. 

Nous recevons des orientations issues de partenaires. Nous allons alors réaliser un entretien individuel avec la personne et ensuite faire des recherches d’accompagnement. C’est la méthode classique du DAHLIR. 

Mais je vais aussi sur le terrain. Je participe par exemple à toutes les fêtes de quartiers. J’essaye d’être présente sur les différents événements, sportifs par exemple, qui se passe dans le quartier.
Sur le terrain, on s’organise aussi avec les autres acteurs (animateurs des centres sociaux, autres mĂ©diateurs…). On Ă©change pour aller dans les quartiers ensemble, car c’est plus productif d’être Ă  plusieurs pour aller au contact des gens. On met aussi en place des actions communes, comme des sĂ©ances d’activitĂ© physiques, des actions autour d’Octobre Rose par exemple… 

Dans ce cadre, je vais aussi à la rencontre des mamans à la sortie d’école dans les quartiers, ou aux Café Habitant organisé par les centres sociaux. Il est important d’aller au contact des gens et de se faire connaître. 

Mais nos actions dépendent vraiment du fonctionnement du quartier, des partenaires et de la typologie du quartier. J’interviens dans 3 QPV sur Bourg et cela représente une superficie assez importante, c’est à prendre en compte dans notre façon de fonctionner. 

 

As-tu des exemples de réussite de tes actions, de tes accompagnements ? 

J’ai plusieurs exemples, mais je peux par exemple citer l’accompagnement de deux dames que je réalise depuis 1 an et demi maintenant, presque depuis mon arrivée. 

J’ai pu les accompagner à travers le projet “Couture et Culture” d’abord, projet dans lequel les participants devaient coudre pour une exposition culturelle. Ensuite, nous avons enchaîné avec un autre projet couture, cette fois en association avec une compagnie de théâtre. 

Suite Ă  cela, elles ont voulu poursuivre, et d’autres bĂ©nĂ©ficiaires voulaient continuer d’apprendre. Pour rĂ©pondre Ă  ces envies, ce sont ces deux dames qui ont crĂ©Ă© et qui animent un atelier couture pour dĂ©butantes. Je ne les ai pas accompagnĂ©s vers une structure ou une activitĂ©, ce sont elles qui l’ont dĂ©veloppĂ© ! Elles organisent un atelier tous les vendredis matin, bĂ©nĂ©volement. J’accompagne maintenant des personnes vers celui-ci.  

De plus, pour l’une d’entre elles, qui était très renfermée au début, cela lui a permis de s’ouvrir et d’avoir désormais de nouvelles envies, de pratiquer une activité physique par exemple. Elle se sent prête à sortir de sa zone de confort. 

Les bĂ©nĂ©fices de nos actions vont donc plus loin que juste la pratique, mais se retrouve dans l’ouverture et dans la sociabilisation… Cela permet Ă  des personnes d’avoir parfois un nouveau dĂ©part. 

 

Quelles difficultés rencontres-tu dans tes accompagnements ?
La seule difficulté à laquelle on est confronté est le manque de places dans les clubs. Ce manque de places peut fermer des portes aux personnes que l’on accompagne.

Il y a donc encore un gros travail à faire avec les clubs, pour qu’ils nous connaissent, qu’ils aient confiance, et pour qu’il y est une meilleure intégration de tous. Mais avec le temps, cela finit par payer. Petit à petit, certains clubs deviennent des acteurs et s’adaptent, proposent même des choses pour aider les personnes en difficulté. 

 

Selon toi, qu’est-ce qui fait la réussite du DAHLIR sur les QPV ? 

Il y a un réel besoin auquel le DAHLIR répond. Mais pour que cela fonctionne, il faut vraiment qu’il y ait une confiance mutuelle entre le DAHLIR, les bénéficiaires et les partenaires.  

C’est pour cela que l’on souhaite rencontrer le maximum de partenaires dès le début, et que l’on essaye d’établir une relation de confiance sur le long terme. 

 

Que pourrais-tu souhaiter au DAHLIR pour ses 10 ans ? 

Je souhaite que cela perdure, pour les gens que l’on accompagne. Mais en mĂŞme temps c’est ambivalent, car cela veut dire qu’il y a beaucoup de besoins, de manques… 

Mais je souhaite que cela se développe et que l’on aide le plus de gens possible. Et que l’on puisse manger du gâteau d’anniversaire dans 10 ans ! 


Propos recueillis par Pierre Boccon